L'Union européenne a annoncé mercredi une série de mesures visant à réduire le fardeau réglementaire dans le domaine de l'intelligence artificielle et des données ( AFP / Nicolas TUCAT )
L'Union européenne a annoncé mercredi une série de mesures visant à réduire le fardeau réglementaire dans le domaine de l'intelligence artificielle et des données, au nom de l'urgence à redresser la compétitivité de l'Europe, tout en se défendant d'affaiblir les droits des citoyens et des consommateurs.
La Commission européenne propose notamment de donner plus de temps aux entreprises pour appliquer ses nouvelles règles sur les systèmes d'intelligence artificielle dits à "hauts risques", après des appels de part et d'autre de l'Atlantique à assouplir la réglementation.
L'UE s'est dotée l'an dernier d'une ambitieuse loi en matière d'IA (AI Act), qui doit entrer en vigueur sur plusieurs années, et Bruxelles veut désormais donner au secteur jusqu'à fin 2027, au lieu d'août 2026, pour se conformer aux obligations sur ces systèmes à hauts risques. Il s'agit d'IA qui concernent des domaines sensibles comme la sécurité, la santé ou les droits fondamentaux.
C'est l'une des mesures phares d'un projet de loi de simplification de la réglementation en matière numérique, présenté mercredi par Bruxelles.
L'exécutif européen assure avoir écouté les entreprises du secteur, qui craignent de ne pas être prêtes à temps, et dénoncent des charges supplémentaires.
- "Encombrement réglementaire" -
"Nos règles ne doivent pas être un fardeau, mais une valeur ajoutée. D'où la nécessité de prendre des mesures immédiates pour se débarrasser de l'encombrement réglementaire", a affirmé lors d'une conférence de presse Henna Virkkunen, vice-présidente de la Commission chargée du Numérique.
Les dirigeants français et allemand ont eux-mêmes appelé l'UE à faire une pause d'un an dans l'application de l'AI Act, lors d'un sommet mardi à Berlin, afin d'aider à redynamiser l'économie européenne et à combler le retard de ses entreprises en matière d'IA.
La Commission veut accorder plus de temps aux entreprises qui développent des systèmes d'IA considérés comme à "haut risque" pour se conformer à la loi européenne sur l'intelligence artificielle (AI Act) ( AFP / Kirill KUDRYAVTSEV )
Le groupe américain OpenAI avait aussi appelé Bruxelles à mettre fin à l'enchevêtrement des règles européennes (AI Act, DMA, DSA, GDPR...) et nationales, y voyant une occasion pour l'Europe de "renouer avec la prospérité et le progrès".
Mais les défenseurs d'une régulation stricte de l'IA, pour lutter contre les risques de dérives, font valoir que la réglementation n'est pas responsable du retard technologique européen et invoquent des causes plus profondes comme le manque de champions européens de la tech, qui empêche le Vieux Continent d'égaler les investissements astronomiques des géants américains, ou la difficulté à retenir les chercheurs les plus talentueux.
Autre point qui suscite la grande inquiétude des défenseurs de la protection des données personnelles, la Commission veut autoriser l'utilisation de données privées pour le développement des modèles d'IA, en cas d'"intérêt légitime", et revoir la définition des données personnelles.
- "Attaque contre les droits numériques" -
Pour autant, "simplifier ne veut pas dire que nous allons relâcher nos règles", a assuré Mme Virkkunen. "Nous avons étudié avec une grande précaution ce que nous pouvons faire pour favoriser l'innovation, tout en respectant la vie privée des citoyens".
Les mesures présentées par la Commission europénne sont critiquées par les militants pour la protection des données personnelles ( AFP / Nicolas TUCAT )
Ce que propose la Commission représente "la plus grande attaque contre les droits numériques des Européens depuis des années", a répliqué dans un communiqué le militant autrichien de la protection des données Max Schrems.
Par ailleurs, parmi les propositions aux conséquences les plus visibles pour les internautes, la Commission veut lutter contre la multiplication des bandeaux d'autorisation ou de refus des cookies, ces outils de mesure et de pistage publicitaire.
Ces bandeaux omniprésents agacent de nombreux utilisateurs, même s'ils servent à leur donner un meilleur contrôle sur leurs données.
Bruxelles voudrait réduire et simplifier ces bandeaux et permettre aux internautes de répondre en seul clic. De plus, leur choix serait valable pour six mois, leur évitant de répéter l'opération chaque fois qu'ils se rendent sur le même site.
L’organisation patronale BusinessEurope a salué des mesures qui répondent "aux demandes légitimes et anciennes des entrepreneurs européens" et a appelé les États membres et le Parlement européen à les approuver rapidement.
Mais les eurodéputés semblent très divisés. Si la droite salue les assouplissements, les sociaux-démocrates appellent à ne pas "déréglementer et affaiblir le cadre juridique numérique soigneusement construit par l'UE".

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